Utilisation de la kétamine chez les patients ambulatoires : que pouvons-nous apprendre des pratiques actuelles ?

Introduction Deux usages hors autorisation de mise sur le marché (AMM) de kétamine sont encadrés par des recommandations : douleurs postopératoires et douleurs rebelles en situation palliative avancée. La prise répétée de kétamine expose à un risque de pharmacodépendance, complications hépatobiliaires et uro-néphrologiques. Peu de données décrivent l’utilisation de kétamine en ambulatoire. Dans ce contexte, le réseau français d’addictovigilance a mis en place une étude pour caractériser l’usage de kétamine par des patients ayant une administration en dehors de l’établissement de santé. Méthode Une étude prospective de janvier à avril 2019 a été réalisée auprès des pharmacies à usage intérieur (PUI) sur les dispensations de kétamine pour des patients ambulatoires. Résultats Soixante-cinq PUI ont dispensé la kétamine à 553 patients dont la majorité dans un contexte de soins non palliatifs (86 % des patients). Les douleurs non cancéreuses principalement retrouvées sont de type fibromyalgie (44 %) et neuropathiques (29 %). L’analyse des 1352 dispensations a mis en évidence une grande hétérogénéité au niveau des modalités d’usage : 91 % d’utilisation quotidienne dans le cadre de soins palliatifs versus 33 % dans le cadre de soins non palliatifs (dans le cadre de fibromyalgie plus de 15 fréquences d’administration différentes) ; l’utilisation par voie intraveineuse/PCA/pousse seringue électrique dans la majorité des cas (78 %) dans le cadre de soins palliatifs versus voie sous cutanée (44 %), orale (32 %) ou orale et sous cutanée (20 %) dans le cadre de soins non palliatifs. Un nombre important d’ampoules a pu être dispensé (supérieur à 30 ampoules pour 10 % des dispensations). Conclusion Cette étude montre que les recommandations dans la douleur ne sont pas respectées avec des modalités d’usage très hétérogènes. Elle souligne l’urgence à une information ciblée et claire sur certaines utilisations hors AMM pour lesquelles aucune étude clinique robuste n’est disponible et pour lesquelles le risque de troubles liés à l’usage et le risque urologique, hépatique et biliaire est avéré.