Étude de l’implication de l’atteinte dopaminergique striatale dans les syndromes dysexécutifs cognitifs et comportementaux chez des patients atteints d’atrophie multi-systématisée

L’atrophie multi-systématisée (AMS) est une pathologie neurodégénérative rare, se divisant en deux sous-types selon la prédominance des atteintes : cérébelleuse (-C) ou parkinsonienne (-P). Selon les critères consensuels, la présence d’une démence est en défaveur du diagnostic d’AMS, mais plusieurs études ont rapporté une atteinte des fonctions exécutives chez ces patients. Dans l’AMS, la neurodégénérescence de la voie dopaminergique nigro-striatale est à l’origine du syndrome parkinsonien et peut être mise en évidence en tomographie par émission monophotonique (TEMP) au 123I-FP-CIT. Le système dopaminergique striatal joue un rôle important dans la neuromodulation des boucles cortico-sous-corticales. Ainsi, outre une implication dans la symptomatologie motrice de l’AMS, l’altération dopaminergique nigro-striatale pourrait également sous-tendre en partie l’atteinte des fonctions exécutives chez les patients. L’objectif de cette étude est de vérifier si la dégénérescence dopaminergique nigro-striatale est corrélée avec le syndrome dysexécutif cognitif et comportemental, de manière différentielle chez les patients AMS-P et -C. Pour cela, nous rechercherons si les données neuropsychologiques et d’imagerie au 123I-FP-CIT, obtenues précédemment dans une cohorte de patients AMS, diffèrent entre les groupes d’AMS-P et -C et nous effectuerons, dans chaque groupe, des analyses de corrélation entre l’imagerie au 123I-FP-CIT et les scores neuropsychologiques. Deux méthodes de quantification des images TEMP de 123I-FP-CIT, utilisant des régions de références et des paramètres de correction différents, seront utilisées et comparées dans la présente étude. Nous avons collecté et analysé de manière rétrospective les données de 24 patients AMS (16 AMS-P et 8 AMS-C), pris en charge au centre de référence maladie rare AMS de Bordeaux entre mai 2014 et septembre 2015 dans le cadre de l’étude COGAMS et ayant bénéficié d’une TEMP au 123I-FP-CIT dans le soin courant. Deux méthodes différentes de quantification d’images ont été utilisées : une première méthode, utilisant le logiciel FreeSurfer® pour segmenter les régions d’intérêt sur un IRM 3D T1, puis le logiciel PMOD® pour quantifier la fixation du 123I-FP-CIT, avec correction d’atténuation et de l’effet de volume partiel (EVP) et une seconde méthode, utilisant le logiciel de quantification semi-automatisée DaTsoft3D, avec correction de l’EVP mais sans correction de l’atténuation. Ont également été collectés l’âge, la durée de la maladie et le score UMSARS total des patients ainsi que les résultats des scores obtenus aux tests neuropsychologiques suivants : test de Stroop, fluence verbale catégorielle et littérale, inventaire du syndrome dysexécutif et comportemental (ISDC) et Trail-Making-Test (TMT A et B), tous explorant différents domaines des versants comportemental et cognitif du syndrome dysexécutif. Aucune différence significative n’a été mise en évidence concernant les résultats des tests cognitifs et comportementaux entre les groupes d’AMS-C et -P. Une diminution significative de l’expression striatale des DAT a été mise en évidence dans le groupe AMS-P, comparativement au groupe AMS-C, avec les deux méthodes de quantification. Au sein du groupe AMS-P, des corrélations significatives ont été mises en évidence entre : 1) les temps de lecture au test de Stroop et l’expression striatale droite (p < 0,001) et gauche (p < 0,001) des DAT avec la méthode (Freesurfer + PMOD) et uniquement à droite (p < 0,001) avec la méthode (DaTsoft3D) ; 2) le temps de dénomination au test de Stroop et l’expression striatale droite (p = 0,003) et gauche (p = 0,006) des DAT avec la méthode (Freesurfer + PMOD) et uniquement à droite (p < 0,001) avec la méthode (DaTsoft3D) ; 3) le nombre de mots au test de fluence catégorielle et l’expression striatale gauche des DAT (p = 0,006) avec la méthode (DaTsoft 3D). Seule une corrélation significative entre le temps de lecture et l’expression striatale gauche (p = 0,002) a été mise en évidence dans le groupe AMS-C avec la méthode (DaTsoft 3D). En décomposant les régions striatales en régions caudées et putaminales, plusieurs corrélations significatives ont été retrouvées dans le groupe AMS-P uniquement. Chez les patients AMS-P, il existe une corrélation entre l’atteinte de la voie dopaminergique nigro-striatale et les résultats des tests cognitifs, reflétant une implication de l’altération de cette voie dans le syndrome dysexécutif. Les deux méthodes de quantification permettent de mettre en évidence des résultats différents, mais valident toutes deux cette hypothèse clinique.