La métabolomique clinique et ses perspectives à l’échelle internationale

Objectifs La métabolomique s’est largement imposée comme une mesure sensible et dynamique d’un phénotype au niveau moléculaire. Elle présente un intérêt particulier pour les biologistes médicaux et les cliniciens comme outil prometteur pour l’identification de potentiels biomarqueurs à visée de diagnostic, de pronostic, ou prédictifs d’états pathologiques, ou encore pour l’élucidation de mécanismes liés à des processus physiopathologiques, y compris en toxicologie [Lenski M. et al. Toxicol Anal Clin 2023;35:96-112]. L’analyse métabolomique est dite ciblée lorsqu’une ou plusieurs voies métaboliques d’intérêt sont spécifiquement étudiées. À l’inverse, l’approche non ciblée est l’étude complète de tous les métabolites détectables dans un échantillon biologique, permettant une vision plus globale de la réponse biologique suite à un stimulus d’intérêt. Actuellement, la métabolomique est principalement mise en œuvre en recherche, mais son utilisation en routine en laboratoire de biologie médicale n’est pas clairement établie. La répartition des différents domaines d’application de la métabolomique clinique est également inconnue. Méthode Une enquête mondiale a été menée en octobre 2023 par le groupe de travail « Metabolomics » de l’association mondiale de biologie médicale, l’IFCC (International Federation of Clinical Chemistry and Laboratory Medicine). Le questionnaire a été diffusé par l’IFCC par voie électronique auprès des professionnels de biologie médicale, de recherche et de l’industrie du diagnostic in vitro. L’enquête comprenait 30 questions couvrant divers sujets sur les applications de la métabolomique clinique, les technologies utilisées et les perspectives de la métabolomique en biologie médicale. Résultats Au total, 400 professionnels de 79 pays ont participé à cette enquête, dont 21 % exerçant dans le domaine de la toxicologie. La moitié des participants ont déclaré avoir utilisé ou utiliser la métabolomique, dont 80 % dans plusieurs contextes. Il s’agissait notamment de la recherche (69 %), du diagnostic (61 %), du suivi clinique de patients (42 %) et du pronostic (36 %). Les participants utilisaient des approches ciblées pour 67 % des cas, non ciblées pour 48 % des cas, tandis que 42 % déclaraient utiliser les deux approches. Les domaines d’applications de la métabolomique sont variables selon le contexte d’utilisation. Par exemple pour le contexte du diagnostic, les applications les plus courantes sont les maladies métaboliques et les erreurs innées du métabolisme, alors que la toxicologie clinique est citée par 10 % des participants. La majorité des personnes interrogées (93 %) s’attendent à ce que l’utilisation de la métabolomique clinique continue d’augmenter au cours des cinq prochaines années, notamment dans le domaine de la toxicologie. Cependant, malgré cet optimisme, la majorité des participants (60 à 80 %) ont reconnu que plusieurs obstacles majeurs, tels que la complexité technique, la disponibilité des tests commerciaux ou le manque de standardisation des tests, doivent être surmontés pour faciliter la mise en œuvre de la métabolomique en routine. Conclusion Les conclusions de cette enquête fournissent une perspective unique pour comprendre les applications actuelles de la métabolomique clinique et mettent en évidence des avancées significatives dans l’intégration de la métabolomique en recherche clinique et en médecine translationnelle. Les perspectives de la métabolomique sont prometteuses en toxicologie biologique et médicolégale pour la mise en évidence d’une exposition et/ou d’un effet et/ou d’une toxicité dû à des xénobiotiques, ainsi que l’amélioration de l’interprétation post-mortem de situations médicolégales comme l’estimation de l’intervalle post-mortem, ou encore la recherche de causes de la mort.